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Volcan d'automne
Nature et saisons

Nous ne sommes encor qu’au printemps de novembre
Contemplant ces sommets partout fardés de brume
Et nous demandant fort de quel plaisant costume
Ils vont bien se vêtir aux frimas de décembre.
Là-haut sur la montagne un ruban ce matin
Par d'étranges vapeurs, brouillards et fumerolles
Montant et descendant entre ces banderoles
Sur les pentes, déroule un très long serpentin.
Dans les plis du vallon, il descend et s'accroche
Se coulant dans les creux remontant en surface
Se rebellant parfois dans une volte-face
Enlaçant dans ses rets les arbres et les roches.
Le grand rideau d'étoupe a rejoint le torrent
Qui ne supportant pas ces voiles incongrus
Dérangé dans son cours gêné par cet intrus
Pour s'en débarrasser, l'attire en son courant.
Alors n'en pouvant mais, la très pâle oriflamme
De partout tiraillée éraflée aux rochers
De part en part trouée et tout effilochée
Dans un dernier sursaut d'un seul coup devient flamme.
Surgis du haut des monts le volcan de l'automne
Laisse couler sa lave à tous les horizons
De rouges et d'ors blancs, d'étoile en floraison
La nature embrasée, en beauté déboutonne.
Puis sur sa nudité les feuilles assemblées
Des jaunes peupliers des érables grenat
Du pin parasol qui toujours vert s'inclina
Tissent une dentelle aux couleurs redoublées.
Chaque arbre, chaque arbuste en arrache un morceau
La teinte se mélange en devenant moins pure
Multipliant les points de la folle guipure
Qui dans le torrent perd son tout dernier lambeau.
Et le soir est venu, les pourpres, les safrans,
Au voile de la nuit, se sont tous effacés,
Sur les bords du ruisseau des laves trépassées,
S'élève maintenant le linceul du volcan.
❤️ 10
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Alain Bernard
13 octobre 2021
Temple Daigo-ji à Kyoto